Le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale salue la volonté de la ministre de la Justice, Sonia Lebel, de mener une réforme en profondeur du droit de la famille. Il veut rappeler à la ministre la nécessité de tenir compte de la présence de violence conjugale dans de nombreux couples, au moment d’entreprendre cette réforme.
Le Regroupement espère que la ministre, qui est aussi responsable de la Condition féminine, saura prendre en considération les inégalités persistantes entre les hommes et les femmes, au sein même des familles et sur le marché du travail. Inégalités qui amènent les mères à s’appauvrir à la fin d’une union. Nous espérons aussi que la ministre aura en tête que le libre choix et la capacité de contracter des ententes ne sont acquis au sein de tous les couples. En effet, au moment de penser des mesures de protection, il faut tenir compte du fait que les femmes victimes de violence conjugale peuvent subir des pressions pour renoncer à leurs droits ou pour accepter des ententes préjudiciables. Aussi, certaines personnes sont moins bien informées. Au printemps dernier , dans le cadre de la Commission citoyenne sur le droit de la famille[1], le Regroupement avait invité à la plus grande prudence face à la présomption de libre choix.
Le Regroupement espère vivement que la réforme ira au-delà du partage des biens, et permettra de mettre l’intérêt de l’enfant au centre de toutes les procédures de dissolution de l’union, notamment pour la détermination des droits de garde et d’accès. À l’heure actuelle, rien n’oblige les juges à tenir compte de la présence de violence conjugale dans un couple. Plusieurs semblent ignorer que bien souvent cette violence se poursuit pendant les procédures civiles, et après la séparation, et qu’elle a des impacts sur les enfants. Dans bien des cas, on ordonne une garde partagée qui oblige femme et enfants à rester en contact avec un conjoint violent. Le gouvernement canadien étudie actuellement un projet de réforme de la Loi sur le divorce. Un élément majeur de ce projet de loi (C-78) est qu’il intègre des éléments dont le tribunal devra tenir compte pour évaluer le meilleur intérêt de l’enfant au moment déterminer les droits de garde et d’accès. La présence de violence dans la famille et ses effets sur les enfants font partie des critères à considérer. Dans son mémoire acheminé au Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des Communes[2], le Regroupement saluait cette approche et la définition de la violence proposée qui inclut la violence conjugale. Nous demandons à la ministre Lebel de faire de même et de modifier le Code civil pour que les tribunaux québécois soient régis par les mêmes règles. Qu’il s’agisse de couples mariés ou en union de fait, les femmes et leurs enfants doivent être protégés. C’est urgent!
Le Regroupement avait déjà sollicité une rencontre avec la ministre. Les difficultés de traitement des dossiers de violence conjugale par les différents tribunaux étaient au nombre des préoccupations. La réforme du droit de la famille nous donne une autre occasion de les mettre en lumière.
Chantal Arseneault, Présidente du Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjuga
[1] http://maisons-femmes.qc.ca/wp-content/uploads/2018/05/2018-memoire-droit-de-la-famille.pdf
[2] http://maisons-femmes.qc.ca/wp-content/uploads/2018/11/Memoire-C-78-Regroupement-des-maisons-pourfemmes-victimes-de-violence-conjugale.pdf